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Le Jardin des délices - Podcast créatif

Aujourd'hui, j'ai envie de partager avec vous un extrait de mon journal d'écriture de SÆVITIA*, un projet que je n'ai toujours pas terminé, mais qui pourrait être, à l'heure actuelle, élargi à l'univers de l'Enfant-Double, puisque le recueil de poésies SÆVITIA en est une partie.
L'entrée que je vais vous lire, répond encore à une sensation d'exclusion de mon propre monde. Alors que je suis sur une pente créative ascendante, une prison me fige en plein mouvement. Je me sens bannie de mon propre imaginaire et j'erre en exilée. Aujourd'hui, je sais qu'elle a un nom, qu'il s'agit d'une surcharge cognitive. Et même si désormais je connais ce risque et mon fonctionnement, quand cette période de surcharge se produit, la frustration est d'autant plus grande... ainsi que la déception et la mésestime de soi-même...

J'ai sensiblement modifié ce texte pour le préciser, le corriger, le ciseler, mais l'essence est la même. Le voici :

Mes clefs

J'imagine souvent mon monde comme une forteresse inaccessible dont j'ai perdu les clefs.
Sur un ilôt, au milieu de nulle part, elle se dresse, froide, menaçante et obscure.
Parfois, ses portes sont béantes et l'accès y est libre. C'est plutôt rare. Le plus souvent, elles sont closes, indestructibles, inébranlables.
Aucune lumière ne transparaît véritablement. J'ai la sensation que mon accès unique est possible. Du bout de mes doigts, je l'effleure... Pourtant, les clefs restent introuvables et les portes scellées.

Là, m'envahit l'angoisse la plus grande. Pourrais-je encore un jour ouvrir ce portail infranchissable sans peine ou me résistera-t-il toujours ?

Parfois, j'ai l'impression que cette porte d'acier n'est qu'un fin film transparent opaque et que je distingue presque les contours d'un paysage, de personnages que j'y ai moi-même intégrés. Ils pourraient me narguer que je ne les verrai pas. Ont-ils une vie qui leur est propre quand je ne les observe pas, continuent-ils d'exister ou sont-ils figés, de marbre, tant que je ne les réveille pas de leur sommeil éternel ?
Ces formes que dessinent ces contours me semblent si familières, j'ai l'impression de pouvoir les saisir, les toucher, les assimiler. Pourtant, dès que je tends la main, elles m'échappent, s'évaporent, disparaissent et la porte d'acier épais réapparaît.
Je n'aperçois ces formes évanescentes que par un minuscule trou qui se rétrécit, se rétrécit, se rétrécit... et se referme me laissant seule loin de ce qui me ressource, de ce qui m'anime, de ce qui me dévore l'âme et le corps par son absence.
Comme un sevrage forcé.

- IXiar, où es-tu ?

À l'heure où j'ai envie de faire visiter ce monde à une unique personne, comment retrouver mes clefs ?

Tiré du journal de SÆVITIA, 9 octobre 2011, face à la Méditerranée.
Remodelé le 18 janvier 2023

SÆVITIA est un projet inachevé de recueil de prophéties liées à l'univers de l'Enfant-Double. L'une d'entre elles est disponible dans le recueil de nouvelles La Légende de la Méduse.